:: "Un autre monde"

"Un autre monde" (L'Herne) est un livre recueil des discours et interventions du ministre des Affaires Étrangères Dominique de Villepin. Le Point a interrogé trois intellectuels sur ce qu'ils pensaient du ministre et de la politique étrangère de la France. Extraits:
Stanley Hoffmann (professeur de relations internationales à Harvard):
' Dominique de Villepin n'est pas un homme de droite. C'est, je le répète, un idéaliste révolutionnaire, qui essaie jusqu'au bout d'être réaliste, ce qui n'est pas facile en temps de guerre, où il y a peu de place pour la morale. En ce sens, il est assez différent de Jacques Chirac, qui manie parfois les droits de l'homme avec un certain cynisme. Les discours de Villepin m'ont rappelé la conception des relations internationales de Jean Jaurès. Il y a chez les deux hommes cette conviction profonde que la culture des peuples et la diversité des cultures sont un moteur de l'Histoire, et que c'est par la culture et non par le rapport capitaliste que les peuples accèdent à la liberté. Dominique de Villepin partage avec des néoconservateurs comme Wolfowitz un même idéalisme démocratique. Mais, tandis que le Pentagone veut imposer la démocratie par la puissance et la force, le Quai d'Orsay veut l'insuffler par la diversité culturelle et la souveraineté partagée. '

Pierre Hassner (spécialiste des relations internationales au Ceri-Sciences po et au CNRS) :
' La tactique de défi à l'Amérique orchestré par Dominique de Villepin s'est révélée plutôt contre-productive. La France a paradoxalement fait le jeu des faucons contre Colin Powell et les partisans de la ligne modérée à Washington. On dira, peut-être à juste titre, que ceux-ci avaient déjà perdu. Raison de plus pour ne pas leur offrir un alibi. Elle a divisé l'Europe et elle a alimenté l'élan martial de l'Amérique : tout le contraire de l'objectif visé. Aujourd'hui, que voulons-nous vraiment ? La France vote en octobre une résolution de réconciliation, mais nie tout ralliement. Elle déclare qu'il est important pour le Moyen-Orient que l'Amérique reste mobilisée en Irak, mais ne fait rien pour l'aider et cherche continuellement la « petite bête ». La diplomatie du Verbe a aussi ses limites : il faut savoir à un certain moment écouter les autres et arrêter de faire le malin. Autrement, la France risque, si elle se montrait incapable de compromis, de ne tirer aucun profit d'une autorité morale si brillamment acquise. '

Leon Wieseltier (dirige les pages littéraires de l'hebdomadaire The New Republic):
' En s'opposant à George Bush, Villepin et Chirac ont émergé comme les héros de l'antiaméricanisme contemporain. C'est un choix réfléchi et respectable en soi, qui suscite la popularité et apporte des bénéfices politiques. Mais c'est un choix qui rend impossible toute réconciliation avec Washington. L'hystérie antifrançaise n'a aujourd'hui plus cours aux Etats-Unis. Reste la seule réalité des positions réciproques. Je pense en revanche que la relation entre l'Allemagne et les Etats-Unis est réparable, car Joschka Fischer et Villepin sont deux caractères opposés. La diplomatie allemande ne vit pas dans la politique de la nostalgie. '

Dominique de Villepin : La controverse (Le Point)

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